Les gens | |
Seapunk : Life is a Beach, and then you Dive |
Par Mathilde Janin
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Voilà un an qu’un nouveau concept de modasses de moins de 18 ans (Mademoiselle Agnès exceptée) a envahi le Net : le seapunk. Enfin, ça, c’est ce qu’on croyait naïvement avant de passer un mois sur la côte. Mais, durant ce séjour, tout a basculé. Comment vivait-t-on avant le seapunk ? S’il est une question qui a hanté la rédaction cet été, c’est bien celle-là. Elle est née pendant que la rédaction jouait du ukulélé sur la plage en improvisant, au moyen de simples coquillages, d’astucieuses maracas. Elle n’a cessé de grandir pendant que la rédaction contemplait, comme un seul homme, tel l’équipage d’un voilier mental, l’océan afin de faire des réserves d’infini. Elle est restée depuis en suspend, immatérielle comme l’air iodé que la rédaction inspirait alors que s’échangeaient, à la lueur d’un feu de camp, des bracelets de l’amitié. Le monde des émosLongtemps, nous avons cru bon de dissimuler à nos cadets quelques uns de nos plus navrants travers de jeunesse. Nos excès de Malibu Coco, par exemple, ou notre amour immodéré pour Le Grand Bleu ; notre collection de posters dauphins ornant notre premier appartement, pris avec ce type qu’on avait emballé sur le tube d’Eiffel 65 I’m Blue (1999, l’année du diable). Sans doute ont-ils vu dans cette somme de dissimulations l’attrait de l’interdit, sans doute y ont-ils projeté le doux frisson de la subversion car, depuis un an, nos chères têtes blondes (mais d’un blond très bleach, qui bleuit au contact de l’eau chlorée de la piscine, sinon, vous êtes out) nous bassinent avec une curieuse mode héritée de ce vaste foutoir mental : le seapunk. L’Eternel retour du mèmeAprès la vague émo, voici donc venir la déferlante seapunk. Tout aurait commencé le 1er juillet 2011 par le tweet suivant, signé Lil Internet : « Seapunk leather jacket with barnacles where the studs used to be ». Depuis, c’est le grand n’importe quoi de l’interprétation. Ce tweet a été perçu comme un manifeste et traduit un peu partout par « Seapunk, un blouson de cuir dont les clous auraient été remplacés par des crustacés ». Déjà, nous souhaiterions comprendre d’où sort cette virgule improbable. Ensuite, il faudrait que l’on nous explique la suite de la légende, qui veut que cette phrase relaye un rêve qu’aurait fait notre Lil Internet (par ailleurs DJ, ce qui pourrait constituer un début de piste). Personne, je dis bien PERSONNE, ne rêve de son blouson de cuir idéal ; pas même Derek Zoolander*.
Mer de tous les vicesIllico, ça a été la folie sur Tumblr. Des artistes (chargés) en herbe se sont mis à nous exposer eux aussi leurs visions seapunk. Les collages ont proliféré : dauphins, sirènes, hippocampes, yin, yang, fluo… Puis c’est les vêtements qui ont été contaminés : du tie & dye au rideau de douche, tout a été exploité lors d’un vaste carnage vestimentaire dont l’apothéose est sans doute la collection a/w 2013 de Jeremy Scott. Pourtant, ce truc qui craint, là… Nous avons le sentiment de l’avoir déjà vu… Il nous est familier… La réponse est proche, tellement proche… Bon sang mais c’est bien sûr. CASTELBAJAC 2008 ALERT. Et oui les enfants : depuis la naissance de l’acid punk dans les nineties, on en a bouffé, du seapunk. On les a eues, après moult négociations, nos crevettes pailletées bleues à talons carrés (catalogue La Redoute 1994). On se l’est fadé, Waterworld (handpetting 1995). J’en passe, et des meilleurs (Aqua, la Diva Plavalaguna dans le 5e élément, Titanic, le tout la même année). Le Seapunk est comme l’océan : éternel, fait de va-et-vient, il est tout à la fois l’eau et le sel de notre jeunesse… Conseil d’une vieille baleine aux jeunes seapunksRevenons donc aux vacances de la rédaction, puisque c’est là que l’Epiphanie nous est venue : nous sommes tous les ancêtres du seapunk. Nous ne pouvons le renier sans nous renier nous même. C’est sans doute pour cela que nous n’avons rien écouté d’autre que du surf rock depuis 2008 (cf/ SAM’s Mixtape 1 à 12). Nous pouvons nous adapter, nous pouvons évoluer, mais nous ne pouvons pas rompre avec le passé, mec. C’est là que Point Break intervient. Il faut revoir Point Break, inlassablement. C’est de ce film que nous viendra une meilleure connaissance de nous même. Dans ce film, Patrick Swayze porte un t-shirt brassière (actuellement disponible dans les magasins American Apparel) qui révèle ses abdos. Il glisse aussi bien dans l’air que sur la mer. Il connaît la liste de tous les présidents américains, ou du moins de quatre d’entre eux. Il est fast, il est furious, mais sans cramer inutilement de carburant. Il prône l’amour libre et le respect de la nature. Il pense qu’il faut dérober aux banques et suivre la vague, mais reste attentif à ne pas être trop gourmand afin que les compagnies d’assurances remboursent les petits épargnants. Il pense que tuer les gens, c’est mal, mais que subvertir par les armes sans tuer les gens, c’est bien. D’où ce best-of final :
"Ben Harp : En deux semaines, vous n'avez produit aucune avancée, rien, NADA, Nib'. Deux semaines, durant lesquelles le Gang des Présidents s'est encore fait deux banques. Alors si l'un d'entre vous a le début de la queue d'un rat d'un détail intéressant à me communiquer, c'est le moment. Johnny Utah : Monsieur. J'ai pris mon premier tube aujourd'hui, Monsieur."
"Ben Harp : Tu penses que le contribuable aimerait, Utah, apprendre qu'il paye des impôts pour qu'un agent fédéral prenne des cours de surf et se lève des minettes ? Johnny Utah : Des gonzes. Ben Harp : De quoi ? Johnny Utah : Le terme approprié est "gonze", Monsieur."
"Ben Harp : T'es du genre qu'il faut pas chauffer, c'est ça hein, gamin ? Fougueux, stupide et les couilles gorgées de foutre."
"Bohdi : La crainte entraîne le doute et, dans le doute, tes pires craintes prendront corps."
"Bohdi : Pour avoir le maximum, il faut être prêt à payer le prix maximum. Il n'y a rien de tragique dans le fait de mourir en faisant ce qu'on aime."
Merci à Myrtille et à Jade pour leur bracelet de l’amitié, le vœu, le toboggan aquatique, et à Sandrine pour la réconciliation cosmique #summer12 * Il est à noter que ledit Derek clamait, dès l’orée des années 2000, être un Merman, un "Siroi" en VF. Coïncidence ?
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