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Jeremy Lin'credible |
Par Antoine le Troadec
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De coupeur d’oranges à la Adam Sandler dans Waterboy à pièce maîtresse de l’animation offensive de New York Knicks moribonds, Jeremy Lin est devenu THE phenomenum médiatico-sportif outre-Atlantique depuis le début du mois de février. Retour sur ce conte de fée à la sauce ricaine avec un peu de Barack Obama, de Kim Kardashian, de Jésus et de Fruit Ninja. 4 février, jour de grâceComme dans tout bon conte de fées, l’histoire commence par un concours de circonstances. Alors qu’il n’avait joué qu’une minute depuis son arrivée aux New York Knicks le 27 décembre dernier, un flot de blessures chez ses camarades (le franchise player Carmelo Anthony, les meneurs Mike Bibby et Iman Shumpert) fait sortir notre petit Jeremy du banc. Et bam, 25 points contre les Nets. Coup de chance ou pas, notre padawan récidive le surlendemain avec 28 points et 8 passes décisives pour sa pomme. Les Américains, si friands de stats, ont montré que ça faisait 30 ans et un certain Isiah Thomas (un cousin d’Izia sûrement) qu’un débutant dans un 5 majeur d’une équipe NBA n’avait accompli une telle performance. Le phénomène est né. Le joueur enchaîne, puis cannibalise son équipe dans les succès contre Dallas, le champion en titre, et les Lakers, où il s'offre le luxe d’humilier Kobe Bryant.
Pourquoi cette référence au parcours scolaire de Jerem’ ? Tout simplement parce que le mec a choisi Génie option math comme deuxième langue. Il éprouve en effet aussi peu de difficultés à résoudre des équations qu’à enfiler les paniers. Crossover, switch, il rentre à Harvard. Une parenthèse en revenant un temps sous nos latitudes. En France, au rayon des cendrillons du sport on a Steve Savidan, Franck Ribéry voire Tony Vairelles période lensoise (avant sa descente aux enfers jusqu’en prison). Des parcours où se croisent des cicatrices, des poubelles et des coupes mulets. Pas la gloriole. Avec Jeremy Lin on est plus près d’un Socrates diplômé de médecine. Seulement voilà, faire Harvard pour devenir basketteur professionnel, ce n’est pas la voie royale. Jerem’ ne se fait pas remarquer à la Draft 2011 et entame un parcours chaotique où il devient agitateur de serviettes en chef sur divers bancs NBA (Golden State, Houston). Mais c’est à New York, dans le sacro-saint Madison Square Garden, qu’il sort enfin de sa boîte et attire les spotslights du monde entier. The perfect Asian boy next doorAprès avoir mis la misère à Kobe et consorts, les médias américains ont vite compris qu’ils tenaient là une nouvelle mascotte. Sélectionné au All Sar Game dans l’équipe des Rookies, ses performances sportives en dents de scie (2 points à 10 % de réussite contre le Big Three de Miami le 29 février) importent peu tant l’emballement médiatique qui accompagne chacune de ses sorties est retentissant. Les médias américains - et notamment des villes à forte population originaire d’Extrême-Orient comme San Francisco, New York ou Vancouver - consacrent une large part de leurs infos sportives à leur nouvelle coqueluche : leur Super Lintendo Orpheline de grandes icônes sportives depuis le départ du colosse chinois de 2 m 29 Yao Ming, la communauté asiatique s’est empressée de jeter son dévolu sur ce fils d’immigrés taiwanais. Né sur le sol américain, avec un physique banal pour un basketteur (1m92), il ne possède en aucun cas le côté « tête de pont de l’Empire du Milieu » de son prédécesseur (en atteste cette bande-annonce). De plus, son côté Harvard « j’ai travaillé vachement dur pour en arriver là » en fait un exemple parfait de la mentalité et du cliché asiatique. A cette panoplie déjà bien fournie d’asiatitude, il saupoudre le tout d’un côté nerd assumé, comme dans cette vidéo réalisée du temps de ses années dans la prestigieuse université du Massachussetts. Il y démontre une même facilité à dégommer tout ce qui bouge à Fruit Ninja sur son iPhone, que devant des algorithmes népériens. Revers de la médaille, ce combo de stéréotypes fait aussi grincer quelques dents, comme celles du journaliste Chuck Leung qui livre sur Slate son admiration teintée d’énervement.
Hormis quelques voix dispersées, c’est toute l’Amérique qui s’est retrouvée embarquée dans la Lin Mania : déjà 620 000 followers sur Twitter, et 1,4 million de subscribers sur Facebook. ESPN s’est chauffé en organisant un sondage pour choisir THE NICKNAME. Buzzfeed en a recensé d’autres encore mieux ici. Au choix : Linderella, Linsanity, Linception etc. Pas mal pour un mec quasi inconnu il y a encore 1 mois. Comble de la hype, Barack Obama, en bon aficionado de basket, s’est permis de le namedropper en affirmant au passage qu’il le suivait avant son explosion (ici). Autre exemple, Kim Kardashian, l’héroïne de télé-réalité, connue principalement pour ses fesses rebondies, sa sextape, et puis on ne sait plus trop quoi, lui a proposé un date. Epic fail, il l’a bâchée, prétextant qu’elle n’était pas son type. Sinon on a eu droit à Jeremy Lin fait du bowling, Jeremy Lin va voir jouer son ancienne équipe de Harvard, etc. Lin croyantDifficile de garder les pieds sur terre ? Alleluia ! Jerem’ a un allié de poids. Son bro : Jésus. Le meilleur homeboy depuis l’an O. Il n’hésite pas à lui faire un big-up dans sa vidéo « college Humour » (à 3 mn 18). Son avatar et sa description Twitter possèdent également un tour biblique prononcé. A l’instar de Michael Chang (le mec qui a osé faire ça à Roland Garros), autre petit prince de la communauté asiatique nord-américaine, il se réfère allégrement à Dieu dans ses interviews. Au pays des Born Again Christians, c’est souvent synonyme de jackpot dans l’opinion publique. L’ancien tennisman conserve toutefois une longueur d’avance sur le prêche religieux, comme le prouve son site officiel, mais aussi le fait que tout journaliste souhaitant l’interroger sur sa carrière sera obligé de réserver un encart à sa foi. Jeremy Lin aurait pu être ce Chang-là mais sa vérité, il l’amène sur le parquet où il doit maintenant mener son équipe vers les playoffs. Quatre mois pour montrer qu’il a sa place au côté des vraies icônes de ce sport. Tweet
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